Tag Archives: Blanche Gallimard

Mon frère, de Daniel Pennac

29 Sep

Lu par… Alys

I’d rather not

 

 

 

 

Il y a des années à sexe, des années à rires et des années à morts. Cette année, on est bien dans une année morbide. Après celles et ceux qui se suicident, qui meurent d’un accident ou qui tuent, voici celui qui pleure son frère juste mort. Le narrateur revient longuement sur leurs moments de complicité pendant l’enfance, la distance qui les a séparés à l’âge adulte, etc. Le tout entrecoupé (quasiment une page sur deux) de passages du magnifique Bartleby de Melville. C’est d’ailleurs le seul intérêt qu’on y trouve.

Melville ? Mettez m’en une bonne moitié.

Vers la beauté, de David Foenkinos

21 Sep

Lu par… Alys

Musée du poids lourd

 

 

 

Antoine est maître de conférence aux Beaux Arts de Lyon. Un jour, on ne sait pas pourquoi, il a décidé de tout quitter pour devenir gardien au Musée D’Orsay. Il est assigné à la salle des Modigliani, et ça loupe pas, on se tape le parallèle avec Jeanne Hébuterne, la fiancée du peintre au destin terrible.

En fait, Antoine a eu un jour comme élève une jeune femme super douée, qui avait eu le malheur de tomber dans son enfance sur un professeur de peinture aux mains (très) baladeuses. Du coup, elle avait beaucoup de mal à s’en remettre, et un jour qu’il lui avait fait une critique sur une de ses toiles, elle a sauté par la fenêtre (comme Jeanne H.). Antoine, traumatisé, s’est barré à Paris sans donner de nouvelles à personne pour devenir gardien de musée.

Attention, spoiler : on apprend à la fin que la pauvre étudiante avait croisé le jour même son bourreau et que du coup c’est pour ça qu’elle s’était suicidée. Donc que ça n’avait rien à voir avec Antoine. Mais c’est pas grave, il n’a pas tout perdu, puisqu’il finit par se taper la DRH du d’Orsay.

Voilà. Rien de plus. C’est nul. A choisir, achetez plutôt une place pour le Musée d’Orsay, ça vous coûtera 3 fois moins cher, et vous aurez au moins le plaisir de voir de la vraie beauté.

Tout est bien qui finit bien.

Ma Grande, de Claire Castillon

11 Sep

Lu par… Jean-Marc

JM, c’est un gentil. 3 moustaches « pour équilibrer » a-t-il dit.

 

 

 

 

 

Que penser du dernier roman de Claire Castillon ? A l’évidence, elle a un sujet, une manière d’écrire, qui n’est pas encore du style, mais une obstination dans le monologue intérieur qui fait entendre, au fil des pages, un ronronnement familier. On s’habitue à lire ce livre, comme on s’habitue à ce récit d’un homme écrasé par sa femme, jalouse, possessive, haineuse, misanthrope, retorse, mesquine. C’est beaucoup pour un seul personnage de roman, et tant de noirceur, qui pourrit inlassablement la vie de couple, les relations familiales et amicales, finit par imposer au lecteur une forme de fascination. On se découvre voyeur, vaguement fasciné, hésitant parfois à lancer au mari malmené un « casse-toi, pauv’ con ! » ou bien, souvenirs en noir et blanc, à lui conseiller de regarder La Poison, film définitif de Sacha Guitry sur les derniers feux de l’amour conjugal.

Pourtant, Ma Grande est vraiment chiante et pas sympa.

« Tu as pas supporté notre proximité. Tu t’es vengéesur la petite. Tu avais besoin de gueuler de toute façon. »

« Tu passais des assiettes en carton remplies de canapés. Avariés. Le tarama avait jauni. Avec la chaleur, ça avait tourné. Tu m’as vu en jeter et tu as crié Ça va pas la tête ? On s’en fout, ils vont les manger. »

Mais, qu’il s’agisse de tarama, de vacances, d’enterrements ou de la femme de Gab, un ami d’enfance du narrateur, qui se trémousse « trop » pendant la Salsa du démon, l’accumulation de scènes, de souffrances, de rancœurs, ne fait pas une progression. Certes bien mené, le catalogue peine à devenir récit ; il reste un catalogue, une succession de petits drames qui s’emboîtent sans s’élever.

Des petites phrases sèches, un rythme las et syncopé, un drame ordinaire, qui s’écoute sans doute un peu trop écrire. Ma Grande est un récit adroit mais plat, et c’est peut-être pour cela qu’on s’y attache un peu.

Verdict ? C’est plat, la science a parlé.

L’autre qu’on adorait, de Catherine Cusset

1 Nov

Lu par … Antonin

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Cucul la poiline

 

Cette année, l’accessit « Keyser Söze en fait c’est Kevin Spacey » de la 4e de couv’ qui balance la fin a d’ores et déjà été décerné à L’autre qu’on adorait, de Catherine Cusset. Ce livre retrace en effet la vie de : « Thomas, un homme d’une vitalité exubérante qui fut l’amant puis le proche ami de la narratrice, et qui s’est suicidé à 39 ans aux États-Unis. »

Thomas, donc, sympathique et passionné, manque Normale Sup’ puis s’expatrie aux USA, plein d’ambition. Étudiant à Columbia, tout semble possible. Mais les échecs se succèdent, amoureux (Sophie, Ana, Elisa, Olga, Nora, etc…) comme professionnels (Princeton, Portland, NYU, etc…). Pourquoi lui refuse-t-on les postes de Prof prestigieux? Est-ce son impossibilité à publier sa thèse sur « Proust et le classicisme » ou parce qu’il est trop brillant? Alors Thomas boit, choit et enfin comprend tout : c’est parce qu’il est bipolaire.

Un récit à la seconde personne du singulier, entre hommage et mise en abyme, qui aurait pu émouvoir. Pourtant certains ingrédients faciles nuisent à sa qualité.

Parallèles culturels douteux entre le héros et les Grands de ce monde ( « Proust et toi avez en commun l’extrême sensibilité artistique » ou « Vous connaissez tous les deux la maladie, pour Proust l’asthme, les étouffements, l’angoisse, pour toi la nécrose de hanche et la dépression »), maladie psychiatrique téléphonée et phrases de cul pour khâgneuses ( « Elle sait que la fessée est un signe d’adoration, (…) elle adore ta virilité, ton énergie, ta capacité à faire l’amour 24 heures sans t’arrêter, la folie » ) qui valent surtout à Catherine Cusset, cette année, de figurer parmi les trois finalistes du prix Trop Virilo.

 

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« Thomas ? connais pas. »

 

La Cheffe, Roman d’une cuisinière, de Marie NDiaye

28 Oct

Lu par Alys

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Quatre moustaches puissantes

 

L’histoire d’une cuisinière surdouée racontée par un amoureux transi.

Celui qui raconte, c’est son ancien second et confident, qui a fini par tomber amoureux d’elle et tente de percer le mystère de son existence. On suit donc l’histoire de cette surdouée de la cuisine, depuis son enfance pauvre dans la campagne bordelaise, jusqu’à l’ouverture de son restaurant et son sacrement.

Malgré des procédés littéraires parfois trop présents (atermoiements dans le récit, phrases très longues, italiques pour parler du présent, etc.), qui rendent difficile l’entrée dans le roman, on finit par être intrigué de ce curieux personnage de cuisinière. Pas féminine pour un sou, à la fois attirante et glaciale, ses contours sont aussi flous que sa cuisine est précise.

Un discours intéressant sur l’aspect organique, originel de la cuisine, et de la nourriture. Sur l’ensorcellement du cuisinier et le rapport au plaisir. Pour raconter comment un personnage austère et froid est capable de donner tant de plaisir, jusqu’à partager avec ses clients une relation parfois très intime.

C’est du 4 moustaches, et on finit avec la dalle.

 

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La cheffe (allégorie Virilo)

 

 

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Mais aussi lu par… Beybey

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Pas mieux

 

La Cheffe est cette femme sans nom, uniquement une fonction qui devient état, à l’enfance miséreuse et au passage à l’âge adulte trop rapide, dont les cheveux perpétuellement tirés en sévère chignon contrastent avec une sa cuisine, riche et inventive.

Ancrée dans ce qu’on imagine être les années 70 à 90, elle fait son apprentissage involontaire chez les Clapeau, un couple semblable à son nom, qui fleure bon le Bordelais et la gourmandise, avant de s’établir à son compte.

Narré par un de ses commis de cuisine, quasi-omniscient car il aurait reçu ses confidences, le récit est tout de même biaisé car cet homme a haï tout de ce qui éloignait la Cheffe de lui. L’intériorisation des contraintes par la Cheffe et la justification de cette attitude est donc retranscrit avec beaucoup de distance, non sans ironie, un peu à la manière d’une Vipère au poing ou d’un L’Enfant, mais aussi très directement, car ledit commis ne se cache pas d’avoir éprouvé un amour total et intemporel pour sa patronne.

Le personnage de la Cheffe est un mystère, et sa distance glaciale intrigue. On s’acharne : l’envie, jusqu’au bout, de comprendre cette femme s’intensifie (et de mon point de vue, qu’on n’y arrive absolument pas fonctionne très bien).

On le savait, Marie NDiaye est une styliste : pas d’écriture blanche avec elle. Un peu exagéré parfois, les effets marqués me gênent peu dans La Cheffe. Il y existe en effet une totale cohérence du propos, une analyse poussée de la richesse de la langue opposée à la richesse des plats, un travail les descriptions qui ajoutent au mystère. Pourtant, et c’est ce qui la fait stagner à 4 moustaches, c’est un peu exagéré : la redondance de certains propos, l’italique du temps présent, l’histoire un peu factice de la fille de la Cheffe alors que sa relation à sa mère est très bien traitée. Au surplus, l’histoire tient sur un fil et on aimerait avoir un peu plus de chair dans la description de la vie de la cuisine, de cet appartement au-dessus du restaurant, de l’intense post-partum de cette femme sans attache.

Alors même que les plats de la Cheffe ne m’attirent pas (j’ai un peu l’impression d’avoir ça dans l’assiette), j’ai envie de comprendre comment cette femme quasi sans sexe gère son rapport au plaisir, comment il la motive et la dégoûte à la fois, car on reste captivés par son génie, et quels pourraient être ses traumatismes, dont finalement nous ne saurons que ce qu’on veut bien nous dire.

 

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Une sexualité introuvable

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Livre pour adultes, de Benoît Duteurtre

21 Oct

Lu par Alys

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Mauvais poil

 

Ne vous affolez pas chers lecteurs, il ne s’agit ni d’un livre érotique, ni d’un mode d’emploi à usage de ceux, qui selon Google sont parvenus au terme de leur croissance, ayant normalement la capacité de se reproduire. Et oui, nous aussi on est déçus.
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Non, ici on parle de la mort d’une mère, « qui croyait à la joie de vivre », de souvenirs d’avant, de quand c’était bien, quand il n’y avait pas encore trop de touristes (surtout les Chinois hein), quand Pigalle avait encore une âme et les petits villages français une vie. Quand les Français étaient respectés dans le monde entier pour leur supériorité.
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Résidence d’artiste (vue de l’auteur)

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Bref, vous l’avez compris, un roman ultra passéiste, et encore, si ça n’était que ça, personne n’est jamais mort d’être un vieux con, et qui sait, on le deviendra peut-être tous.
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Le problème, c’est la prétention sans borne qui rend le truc quasi-illisible. La musique est forcément classique (et puis celle des grands noms, hein, pas le mec qui joue de la trompette dans la rue), et depuis quand exige-t-on des Français qu’ils parlent en anglais quand ils voyagent en Europe de l’Est (rendez-vous compte, ils sont meilleurs, du coup ils se sentent supérieurs, c’est un comble).
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Une moustache, parce qu’il ne nous a pas laissé indifférent, c’est juste qu’on a pas aimé.
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Halte-là, Benoît

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