Editions Gallimard
Lu par Claire
« Je contemple ce radeau qui ressemble à la vie en Russie : une chose lourde, dangereuse, au bord du naufrage, soumise aux courants mais où l’on peut faire du thé en permanence. »
C’est en Sibérie, sur les rives du lac Baïkal, qu’a choisi de passer six mois en ermitage Sylvain Tesson. Seul, donc, la majorité du temps, si l’on exclut les espèces animales locales.
On a tous, du moins j’ose l’espérer, rêvé un jour de se retirer du monde ne serait-ce que quelques heures, afin de pouvoir répondre à cette angoissante question, loin du vacarme des chaînes télé et des soldes des grands magasins : suis-je capable de cohabiter seul avec moi-même? Même si nous, dodus et civilisés échantillons du XXIème siècle, nous aurions plutôt choisi un confortable mas provençal, voire un couvent de Toscane. En Sibérie, sachez-le (la rédaction rejette toute responsabilité), on trouve des ours, des russes, du poisson séché, et -30 degrés une bonne partie de l’année.
Equipement de base nécessaire à une telle retraite: une bonne soixantaine de livres, une quantité raisonnable de pâtes et de tabasco, et de quoi se saouler honnêtement à la vodka.
Sylvain Tesson nous offre ainsi le journal de ces six mois, le « laboratoire de ses transformations », parsemé de jolies formules et de pensées pertinentes sur notre rapport au monde, sans jamais vraiment tomber dans l’écueil de la critique virulente de notre mode de vie.
Des influences? Difficile de ne pas penser aux écrivains voyageurs, et autres Into the Wild. (Espoir: si Sylvain Tesson ressemble à Sean Penn, je pars pour Irkoutsk.)
Une sensation? Celle d’avoir entre les mains un bon et agréable outil de réflexion, qui économisera peut-être à certains le déplacement jusqu’au point N 54°26’45.12 / E 108°32’40.32.
En bref, comme une bonne tisane, une lecture qui non seulement ne peut pas vous faire de mal, mais pourrait même vous faire du bien.
« Aujourd’hui, quand on rencontre quelqu’un, juste après la poignée de main et un regard furtif, on note les noms de sites et de blogs. La société humaine a réussi son rêve : se frotter les antennes à l’image des fourmis. Un jour, on se contentera de se renifler. »
Les poilus parlent aux poilus