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Désintégration, d’Emmanuelle Richard

7 Oct

Lu par… Alys

VNR

 

 

 

La narratrice est écrivain (ben tiens). Le roman s’ouvre sur l’anniversaire de ses 18 ans, qu’elle partage avec deux copines et qu’elles ont organisé dans un club d’équitation. Le problème, c’est que la narratrice (appelons-la Manu, parce que bon, on a bien compris qui parlait), donc le problème, c’est que Manu, elle préférait un anniv avec des bières et des chips, et qu’elle se retrouve coincée avec ses potes bourges à un anniv qui lui ressemble pas. Du coup, elle se tape le cowboy venu faire une démo de country, et puis aussi un mec du village dont la meuf est à l’anniv.
20 ans plus tard, Manu est devenue une auteure connue (ben tiens), et au cours d’un dîner avec un réal connu (pendant lequel ils ne s’adressent pas un mot mais se kiffent quand même, c’est ça l’alchimie des artistes), elle repense à son parcours.
On va vous la faire courte, ca tient en une phrase : Manu a passé sa vie entourée de gens plus riches, plus puissants, plus beaux et mieux sapés, et elle les hait. Tous. Mais bon, elle continue à les côtoyer. Du coup, elle leur reproche sa vie pourrie, ses boulots merdiques chez Leroy Merlin, leurs regards méprisants sur ses manteaux Jennifer. Elle en fait des caisses en mode lutte des classes, et elle continue à fréquenter tous ces « fils de », comme elle les appelle, probablement pour avoir un truc à raconter.

Sur un sujet moult fois traité, on se dit au bout de 100 pages qu’elle va vraiment s’énerver, butter tout le monde, bouffer du fils de (quoiqu’elle s’en tape régulièrement quand même) ou pourquoi pas se pendre dans le salon de sa coloc de 100m2 dans le 17. Ben non, elle continue ses lamentations, à base de phrases type l’art c’est pour les riches « Je ne comprenais pas que l’art et la création puissent être considérés comme un travail » ou les propriétaires, c’est des cons : « quand je pense que ce sont ces gens, tous propriétaires, qui ne connaissent pas le prix du pain« . Et ça sur des pages et des pages.

Aux deux-tiers du roman, sursaut d’espoir, Manu cite feu Phillip Roth : « On se trompe avant même de rencontrer les gens, quand on imagine la rencontre avec eux ; on se trompe quand on est avec eux (…) l’histoire de la vie, c’est de se tromper sur leur compte, encore et encore. »
Ah. On se dit que ça va basculer, qu’elle va se rendre compte que ce qu’elle dit c’est quand même pas super intéressant. Ça se trouve, tout ça c’était du second degré même. On lui pardonne presque d’avoir attendu les 2/3 du bouquin, c’était un peu long mais tant pis.
Mais non. Dans le dernier tiers, Manu est devenue connue, et elle est en plein kiff parce que tous les bourges de la Grande Ville lui mangent dans la main (ben tiens). Et elle continue à les haïr, bien sûr : « ces gens après qui j’ai couru tant d’années sans jamais qu’ils m’envisagent ou se fendent d’un refus viennent à moi tout sourire, cette femme qui m’avait conseillé d’écrire des livres de cuisine me salue comme si nous avions vendu des chaussettes ensemble« .
Un propos creux et sans intérêt. Ce n’est pas un roman, mais une longue lamentation écervelée sur les habitants de la Grande Ville (non mais sérieusement ?) et leur snobisme.
Mention spéciale à la dernière page qui nous a donné des envies de pain dans la gueule : « Ce livre a été composé en écoutant les artistes suivants : 13 Block, 1995, Arsenik, Booba (oui oui), Clara Luciani (oui oui), Damso (…), Fishbach, Kaaris, Kekra, (…), PNL (oui oui), NTM » etc.
Du gros son de banlieusard quoi.

ouin ouin

Dans les forêts de Sibérie, Sylvain Tesson

3 Sep

Editions Gallimard

Lu par Claire

Tesson aime-t-il la vie de couple ?

Moustache fournie

Moustache sibérienne

« Je contemple ce radeau qui ressemble à la vie en Russie : une chose lourde, dangereuse, au bord du naufrage, soumise aux courants mais où l’on peut faire du thé en permanence. »

C’est en Sibérie, sur les rives du lac Baïkal, qu’a choisi de passer six mois en ermitage Sylvain Tesson. Seul, donc, la majorité du temps, si l’on exclut les espèces animales locales.

On a tous, du moins j’ose l’espérer, rêvé un jour de se retirer du monde ne serait-ce que quelques heures, afin de pouvoir répondre à cette angoissante question, loin du vacarme des chaînes télé et des soldes des grands magasins : suis-je capable de cohabiter seul avec moi-même? Même si nous, dodus et civilisés échantillons du XXIème siècle, nous aurions plutôt choisi un confortable mas provençal, voire un couvent de Toscane. En Sibérie, sachez-le (la rédaction rejette toute responsabilité), on trouve des ours, des russes, du poisson séché, et -30 degrés une bonne partie de l’année.

Equipement de base nécessaire à une telle retraite: une bonne soixantaine de livres, une quantité raisonnable de pâtes et de tabasco, et de quoi se saouler honnêtement à la vodka.

Sylvain Tesson nous offre ainsi le journal de ces six mois, le « laboratoire de ses transformations », parsemé de jolies formules et de pensées pertinentes sur notre rapport au monde, sans jamais vraiment tomber dans l’écueil de la critique virulente de notre mode de vie.

Le jury sur les pas de l'auteur

Des influences? Difficile de ne pas penser aux écrivains voyageurs, et autres Into the Wild. (Espoir: si Sylvain Tesson ressemble à Sean Penn, je pars pour Irkoutsk.)

Une sensation? Celle d’avoir entre les mains un bon et agréable outil de réflexion, qui économisera peut-être à certains le déplacement jusqu’au point N 54°26’45.12 / E 108°32’40.32.

En bref, comme une bonne tisane, une lecture qui non seulement ne peut pas vous faire de mal, mais pourrait même vous faire du bien.


« Aujourd’hui, quand on rencontre quelqu’un, juste après la poignée de main et un regard furtif, on note les noms de sites et de blogs. La société humaine a réussi son rêve : se frotter les antennes à l’image des fourmis. Un jour, on se contentera de se renifler. »

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