Tag Archives: Jean Teulé

Et j’abattrai l’arrogance des tyrans, de Marie-Fleur Albecker

17 Sep

Lu par… Camille

moustache affligée

 

 

 

Fidèles ami.e.s du Virilo, l’heure est grave. Une terrible maladie semble s’être déclarée dans le milieu littéraire français: la jeanteulite aiguë. Marie-Fleur Albecker pourrait en être la première victime.

Quels en sont les symptômes ? La première manifestation est souvent trompeuse car elle part d’une intention sans doute louable, celle de mettre en avant un fait historique, un événement peu ou pas connu dans lequel tout ou partie du peuple a joué un rôle capital, souvent au détriment des élites (on pense alors plutôt à une julesmicheléole). Ici, il s’agit de la révolte paysanne de 1381 chez nos voisins d’outre-Manche, selon le point de vue de Joanna Ferrour, tenue pour l’une des rares participantes au milieu d’une foule essentiellement masculine. Très vite, le propos se veut donc à la fois éminemment féministe et populiste, et c’est là que le carnage commence. Car pour faire parle le peuple, l’auteure n’a rien trouvé de mieux que de lui attribuer un parler « moderne », on dit merde, bite et cul, entre les brèves de comptoir et un tube de rap français. Ben oui, évidemment. Pour raconter l’histoire de la plèbe à la plèbe, forcément il faut se mettre à son niveau, c’est le deuxième symptôme de la jeanteulite. Ça donne « ouais, la noblesse, assise sur son cul à nous tondre comme des moutons déjà dépiautés pour soi-disant nous protéger. Sans toison, on est à poil » ou bien « enfin bref, il faut ajuster des trucs, c’est sûr, mais tout ça me semble un peu extrême, un peu too much« . Vous la sentez, la connivence ? Vous l’avez l’empathie ? A ce stade, démagogie ou mépris de classe, mon cœur balance.

Le tout pour créer, sans doute, un effet comique. Car troisième symptôme, il faut du lol. Pour toucher la plèbe, faut que ça glousse. Ou pas. Pour ça rien de tel que les fameuses incises entre parenthèses, selon la formule mathématique chère à Teulé : décalage = humour = ventes x 3,14.

C’est encore mieux quand ça tombe bien à plat: « En réalité pendant longtemps, Dartford fut moins un carrefour qu’un T. […] La branche à main gauche (que l’on appelle communément ouest) part vers Londres. La branche à main droite (est, donc) s’ouvre vers Canterbury […]. Enfin, le corps du T file vers le bas (que l’on appelle communément sud). » Je crois qu’un bruit de pet avec la main sous le bras me ferait plus rire.

Mais la jeanteulite prend ici un caractère sinistre quant on en vient à parler de féminisme. Joanna a été violée par son premier amour. Elle en conçoit un ardent désir de revanche. Contre les hommes ? Non non. Eux, elle se contente de les mépriser car ils ne pensent qu’avec leur bite. Subtil. Ce qu’elle veut, c’est l’égalité, même si dans son combat elle doit apprendre à se muselet pour ne pas passer pour une hystérique (sic). C’est tellement navrant de démagogie qu’on en lirait presque avec plaisir les passages où l’auteure se contente de retranscrire Wikipédia ou les guides touristiques de la région londonienne (« le donjon profite d’une surélévation assez exceptionnelle au fond d’un méandre convexe, quasi sur sa barre, lieu d’alluvionnement plutôt délaissé d’ordinaire…« )

Je vous invite donc à fuir la contagion.

y a genre whatmille keums on entend qued’ ça part trop en youk

Entrez dans la danse, de Jean Teulé

27 Août

Lu par… Anne

Plaine alsacienne

 

 

 

 

Qu’est-ce qui pousse un juré du Virilo, désœuvré, au cœur de l’été, à s’emparer de la production annuelle de Jean Teulé, connaissant les déconvenues qu’il s’apprête à affronter ? (cf les éditions 2009, 2011, 2013, 2015, j’en oublie sans doute). En dépit de ses capacités intellectuelles et physiques hors norme,  il s’avère que le juré est un homme, ou une femme à moustache, presque comme les autres, il est sensible à l’air du temps, il lui arrive d’écouter France Inter l’après-midi en semaine et de tomber sur une interview de l’auteur en promo. Pour sa défense, comme souvent avec Teulé, le postulat de départ semble alléchant puisque l’auteur prolifique s’empare de l’épidémie de danse qui frappa la bonne ville Strasbourg en 1518. Sans que l’on sache vraiment pourquoi, des centaines d’habitants se mirent à danser, parfois jusqu’à épuisement, constituant l’un des plus grands épisodes d’hystérie collective de l’Histoire. On pense aujourd’hui qu’il s’agissait de l’expression désespérée d’une misère insondable, car les Strasbourgeois, largement abandonnés par les dignitaires de la ville, subissaient depuis plusieurs années une crise économique, alimentaire et spirituelle sans précédent.

Mais comme souvent donc, sur une idée intéressante, Teulé se prend les pieds dans le tapis. Si son roman contient quelques jolies passes littéraires, il est parsemé de maniérismes et de facilités à hérisser le poil des plus Marxistes d’entre nous. Le peuple souffrant est porté aux nues pour son sacrifice chorégraphique, tandis que la bourgeoisie et la hiérarchie épiscopale sont caricaturées à la truelle, façon San Antonio un lendemain de cuite. Sans doute à l’attention des moins affûtés de ses lecteurs, l’auteur parsème son texte d’incises ironico-débiles entre parenthèses afin de bien  marquer son mépris pour les élites (des fois qu’on aurait pas compris) (c’est agaçant, non ?) (si si, franchement, c’est pénible).

Rajustant dédaigneusement sa moustache, le juré retourne à son Fest-noz.

2 Moustaches, 1 pour l’argent, 1 pour le spectacle mais ne marche pas sur mes chaussures en daim bleu.

 

« Ça suffit, Jean, on va en crever de tes conneries. »

Héloïse, Ouille !, de Jean Teulé

28 Oct
Poil en bataille

Poil en bataille

Lu par François HL et Bérénice

Une version porno mais en latin d’Héloïse et Abélard.

De merveilleuses illustrations pour accompagner le propos : une lecture pédagogique à la portée de toutes les bourses.

 

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La pudeur nous oblige à ne pas faire figurer les illustrations centrales du nouveau roman de Jean Teulé.

Pour les précédents romans de Jean Teulé, c’est par ici et aussi par là.

Charly 9, de Jean Teulé

11 Sep

Julliard

Lu par François

Allô Papa Tango

Rasoir

T’arrête de faire n’importe quoi Jean? Ça suffit, on a compris que t’aimais bien le gore et que tu étais doué pour raconter quand le sang gicle, quand les larmes coulent et quand les gens pleurent. Dans ce nouveau roman historique (on avait beaucoup aimé « Le Montespan » il y a deux ans), Teulé nous raconte les derniers mois du roi Charles IX, surtout célèbre pour avoir ordonné le massacre de la Saint Barthélémy. Passez votre chemin, on se croirait dans un clip de Baz Luhrmann, c’est gratuitement sanguinolent et ça ne dit pas grand-chose… Faut te reprendre là mon grand !

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Lu par Philippe

Duvet épais

Jean Teulé, c’est le roi du pitch et du livre dont tu ressors un peu moins bête, mais pas tant que ça non plus. L’histoire est ici moins punchy et plus connue que dans ses précédents ouvrages (Mangez-le si vous voulez, Le Montespan, Le Magasin des suicidés…). Peut-être est-ce pour cela qu’on lui passe moins de choses : On y révise, mais on n’est plus dans l’ébahissement/effarement. Pour autant, la norme est respectée : Teulé ne fait pas dans la grââânde littérature mais ça se laisse très bien lire. À vous de voir à qui vous l’offrez.  Comme cadeau pour le tonton « féru d’histoire » mais qui préfère souvent regarder les goa’ulds de Stargate, c’est un achat assez safe. Pour votre ami thésard, c’est ridicule. 


Mangez-le si vous voulez, de Jean Teulé

11 Oct

Julliard

Lu par François S.

Le fait divers fait vendre du papier, c’est un fait. Mettez de l’hémoglobine, vous vous rapprochez du succès. C’est le procès un peu facile que l’on pourrait faire à Jean Teulé. Le sujet attire, nous les premiers, bon. Mais, à travers un fait divers sordide et, curieusement assez méconnu, Jean Teulé parvient en toute sobriété à dessiner un portrait de l’humanité, de sa cruauté, de sa bêtise… Son écriture est efficace, ne tombe pas dans le voyeurisme. Il est malgré tout intéressant de prendre le temps de s’arrêter dans la lecture pour se demander pourquoi cette intrigue. On se trouve alors face à un diffus sentiment de culpabilité face à tant d’abjection, d’horreur… Et, en même temps, on veut savoir jusqu’où l’homme peut aller.

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Lu par Bertrand 

On connaissait l’histoire de ce « village des cannibales » racontée par un historien mais le mérite de Jean Teulé est de nous la faire vivre dans sa plus grande absurdité. Comment des hommes ont-ils pu lyncher leur voisin en prétendant ne l’avoir pas reconnu ? Pourquoi lyncher au lieu de tuer tout simplement ? C’est une foule en marche, une rumeur qui enfle qui finit autour d’un banquet. Effroyable et jubilatoire.

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Lu par Philippe

Le sujet est si fort qu’il se suffit à lui-même, et c’est peut-être là le problème. On peu regretter un manque de style, cependant au service de la clarté. On comprend moins qu’une partie pourtant passionnante du récit soit éludée : le procès. On aurait tant aimé avoir des clefs, de vivre le brutal retour à la réalité. C’est un choix d’écrivain, mais il frustre un peu. On lira cependant avec plaisir ce livre en vacances, il en vaut largement le coup.

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Lu par Sophie

L’histoire est connue, les historiens (et pas n’importe lesquels : Alain Corbin lui-même avec son Village des cannibales) s’en sont déjà emparés : en 1870, Alain de Moneys jeune noble apprécié des villageois se fait accuser de trahison (nous sommes en pleine guerre franco-prussienne) pendant la foire de Hautefaye. La rumeur enfle et l’homme finit dévoré par les participants du massacre.

Beaucoup d’aspects semblent rebutants : des erreurs factuelles (qu’on repère à la lecture de l’ouvrage de Corbin), la présentation vendeuse du fait-divers, l’analyse partielle des ressorts de ce massacre collectif (si la mécanique de la rumeur est bien montrée, la guerre par exemple n’est pas assez évoquée), le traitement trop rapide du procès qui constitue un moment fondamental mettant les assassins hébétés en face de leur crime.

En revanche, on apprécie le style libre qui parvient bien à restituer l’atmosphère de cette longue journée de torture ou encore le rythme du roman, mené avec dynamisme. L’ensemble est de toute façon très – trop – rapide et, finalement, un peu décevant.

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