Ed. Sabine-Wespieser
Lu par Xavier
Spoiler alert : des éléments de cet article dévoilent l’intrigue du roman.
C’est un petit livre sur un gros. Les obèses ont peu droit de cité dans la littérature, anti-héros qu’on juge peu intéressants comparés à un artiste loser dans lequel l’auteur arrivera toujours à placer ci et là un peu d’autofiction. Obèse, Clara Dupont-Monod ne l’est pas. Mais elle a bien compris que, dans certain cas, l’obésité était l’expression d’un malaise interne. Et la source d’une solitude incroyable. C’est sur ces deux points que s’appuie son livre.
Nestor, immigré argentin, arrivé en France par hasard, marié avec une immigrée argentine par dépit, dévasté par le décès de sa fille, avale les calories pour faire disparaître ses malheurs. Les premiers restent, les seconds aussi. S’il n’aime plus sa femme, coupable d’avoir laissé mourir l’enfant dans son bain pendant qu’elle se concentrait sur sa machine à coudre, c’est aussi parce qu’il n’aime plus la vie, alors à quoi bon aimer son corps ?
La force de « Nestor rend les armes » est pourtant de ne pas s’attarder sur cette trame de fond mais de faire avancer l’histoire. L’handicap de ce corps, Nestor devra le surmonter pour rendre visite quotidiennement à sa femme mal-aimée plongée dans le coma à la suite d’un accident de la voie publique. En confrontant les malheurs de son protagonistes à ceux d’autres personnages, notamment celui d’une femme médecin à l’hopital, Clara Dupont-Monod évite le jugement.
L’écriture est limpide, précise. On peut toutefois reprocher à Clara Dupond-Monod deux choses : de proposer trois fins alternatives, dont l’intérêt est assez mineur, mais surtout un manque d’épaisseur (sic) des personnages. Le roman aurait gagné à peser un peu plus (double sic), on reste un peu sur notre faim (triple sic).
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Lu par Philippe
Ce livre est tout bourrelé de bonnes idées : Il parle d’un obèse, il a un super titre, le héros s’appelle Nestor, se fait pousser une moustache (par laisser-aller certes, mais tout de même), Nestor est dense, dévoile ses blessures dans un livre court qui propose plusieurs fins au lecteur.
Tout cela aurait pu être très chouette si les personnages ne sonnaient pas totalement faux une bonne moitié du livre, dans un dolorisme agaçant, avec des ellipses pour faire « portrait impressionniste » mais qui font juste brouillon. Cette impression est amplifiée par la triple-fin gadget, qui aurait pu être intégrée en une seule narration limpide et qui n’apporte pas grand chose en l’état à part témoigner du non-choix de l’auteur. Le pachydermique naufrage du héros n’est jamais allégé par l’écriture. Etait-ce l’ambition de l’auteur, de lier ainsi (alors avec brio) le fond et la forme en une première moitié asphyxiante de lourdeur et d’ennui ? L’auteur en fait ou trop, ou pas assez : Les images utilisées sont originales mais manquent de pouvoir d’évocation. La structure du texte est intéressante, mais ne traite pas à fond son sujet (un texte court et elliptique, ça fait beaucoup). Pour tout vous dire, j’ai beaucoup pensé à Gavalda (époque Je l’aimais) en le lisant, en plus court, ce qui est toujours ça de pris. Ou à une Barbery qui essaierai d’être constamment originale. L’auteur tenait là un formidable sujet et quelques idées narratives. On sait maintenant que cela ne fait pas un livre.
Les poilus parlent aux poilus