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Le Dédain, de Guillaume de Sardes

18 Sep
critique1

Dédain de glabre

Editions Grasset

Lu par Alexandre

Marceau est un chouette type.   Charmeur, il sait aussi bien jeter des œillades enjôleuses à des italiennes racées, comme «limer  consciencieusement » des mâcheuses de chewing-gum. Jovial et décomplexé, il aime également  bien faire le zazou avec ses copains, draguer sa cousine de 16 ans, comme ça pour rigoler, et pourquoi pas, confesser publiquement un penchant marqué pour l’onanisme. Un homme complet en somme.

Un livre de trentenaire

Un livre de trentenaire grave cultivé et réaliste

Après cinq pages, on comprend rapidement que l’ambition de Guillaume de Sardes est de livrer à travers son héros, le portrait d’une génération de trentenaires parisiens qui se cherche (mais aussi, se touche) beaucoup.

Cela s’annonce plutôt léger, mais comme la quatrième de couverture nous promet que Le Dédain est « un roman sur différentes manières d’aimer », on peut tout de même entretenir l’espoir de voir s’épanouir un machisme cinglant au fil des pages.

Qu’à cela ne tienne, nous tiendrons bon.

Moue dédaigneuse du trentenaire

Moue dédaigneuse du trentenaire

La suite du livre alterne entre de farouches scènes d’amour tarifées, de la super citation grave cultivée, le récit d’un amour impossible et de vrais morceaux de bravoure réalistes («Marceau regarde Lili tapoter son sachet de sucre, comme s’il était coagulé. Lui a été plus prompt et remue déjà son café. Il égoutte sa cuillère sur le rebord de la tasse, s’apprêtant à dire quelque chose. »)

Au bout du compte, le lecteur en vient à l’édifiante conclusion que, stupéfaction ! les hommes ne pensent qu’à ça. Et puis c’est tout.

Les découvertes, d’Eric Laurrent

21 Oct

Les éditions de minuit

Lu par Philippe

Moustache onaniste

Ce court et agréable livre narre les découvertes sensuelles, littéraires et onanistes d’un jeune homme, de la première affiche du film Emmanuelle, page 33,  jusqu’à la première pénétration, enfin, page 149.

A la recherche des confessions perdues

Entre ces deux nuits de feu, on trouvera du touche-pipi, de l’imparfait du subjonctif, des  pages soutifs La Redoute, des phrases de trois plombes, des playboys, des bonheurs syntaxiques, des corrections de nouvelles érotiques, des quadruples incises, et des subjonctives de subjonctive de subjonctive. Forcément, ça change de Musso ou de VGE.

Le narrateur se remémore donc, en phrases souples et proustiennes, comment il découvrit la sensualité, l’esthétique et la volupté, liant les livres et les corps en un lent et indissociable apprentissage rendu difficile par les lazzi sur sa laideur, d’abord intellectuelle puis uniquement physique. Ce héros, plutôt moche donc, et surtout convaincu de l’être –la laideur n’est jamais qu’une longue expérience de l’invisibilité– est bien sympathique, et il est facile (je me mouille un peu là) de se retrouver dans telle honte, telle peur, tels désirs, si justement décrits.

On ne dirait pas comme ça, mais l'auteur se paluche en vous regardant

Le style d’Eric Laurrent apporte une humoristique distance et évite contre toute attente la cuistrerie, non sans agacer parfois. Tel un vieux con pérorant au coin du feu, un verre de cognac à moitié bu, la logorrhée du narrateur est parfois malvenue, surtout dans les premières pages où il décrit avec longueur des choses évidentes (être au piquet à l’école…). Gageons que cette lourdeur est souhaitée par l’auteur, pour nous obliger à la patience comme une convention de lecture, et apprendre à boire le capiteux breuvage de ses phrases.

Saoulant ? Pas pour autant, dis-je en sortant l’armagnac du buffet. Pour ceux qui aiment le style qui ne se cache pas, Eric Laurrent, sans être totalement parfait, maîtrise avec maestria des phrases magnifiques. Ce style anachronique permet d’être cru tout en restant pudique. C’est réussi et même drôle, l’auteur se permet par exemple trois « notes de bas de pages », d’une phrase chacune et de 9  pages, véritable blague de styliste et coup de brio. On regrettera simplement que cette distance aristocratique empêche l’implication totale du lecteur et ne vise pas à plus de propos littéraire car l’auteur avait largement le talent pour creuser encore plus son sujet.

En un paragraphe, on peut concourir pour le trop virilo

Il n’en demeure pas moins que bigre, voilà un livre à lire, et qui concourt joyeusement pour les deux prix : par son brio et sa justesse pour le prix Virilo, et par un paragraphe d’anthologie (page 72) pour le prix Trop Virilo (extrait qui répond littéralement au critère de « bukkake de mots, poussée de testostérone littéraire » du prix). Pas une découverte, mais une confirmation.

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