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Mémoires d’Outre-mer, de Michaël Ferrier

30 Oct

Lu par Philippe

Moustache nostalgie

Moustache emballée

Le livre de Michaël Ferrier, Mémoires d’outre-mer, n’est pas exempt de défauts :
– Le pitch est trompeur et s’apparente à une trahison de l’éditeur  : l’opération Madagascar, préambule à la solution finale nazie, est totalement survendue sur la 4° de couv’, ce n’est tout simplement pas l’objet du livre, au mieux un détail de l’histoire… (Avec un petit « h ». C’était moins une…) ;
– L’auteur y est plus présent que dans son précédent et excellentissime « Fukushima« , pour peu de choses ;
– Il se la pète grave avec son amoureuse qui est une escrimeuse chinoise que ses potes aimeraient se taper ;
– Les moments de poésie, quand il parle de la nature et ses contemplations, sont moins nombreuses que dans le formidablissime « Fukushima ».
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Le fait qu’il se trouve dans la sélection finale du Prix Virilo malgré ces agaçantes scories témoigne d’autant mieux de sa qualité.
Le fait que je préfère ce livre au Chevillard de l’année est une preuve indubitable de mon affection pour le style de cet auteur singulier, qui -je dois l’avouer par honnêteté intellectuelle- a donc lui aussi un grand-père enterré dans le cimetière de Mahajunga.
Mais partager un peu d’Histoire coloniale et familiale ne fait pas un coup de cœur littéraire. Encore fallait-il être à la hauteur de son récit, mais aussi des rêves et projections fantasmées d’un lecteur bercé par les récits malgaches de sa famille depuis le plus jeune âge.
Michaël Ferrier a réussi ce qui me semblait presque impossible, grâces lui en soient rendues ; il faut bien du talent…
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Egalement lu par Paul
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critique3

Moustache inégale

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PLAIDOYER POUR CLIPPERTON
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Nous avons coutume, au prix Virilo, d’étoffer nos lectures de rentrée d’ouvrages d’auteurs qui ont l’audace un peu folle de vivre en-dehors du Paris intra-muros de la littérature française – c’est-à-dire au nord de la rue Jacob ou au sud de la Closerie des Lilas. Cela nous conduit souvent à de très heureuses découvertes.
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L’audience de notre site internet est d’ailleurs la récompense de cette diversité puisque le Prix Virilo est lu dans l’ensemble du monde francophone – ce dont nous ne sommes pas peu fiers – et plus particulièrement dans les Outre-mer. Salutations moustachues aux 35 lecteurs se connectant régulièrement depuis l’île de la Réunion, aux 18 Polynésiens, aux 11 Guyanais, sans oublier notre infatigable et seul lecteur de Saint-Pierre et Miquelon, qui est un peu notre chouchou.

Comme moi, ces lecteurs auront peut-être trouvé que l’ouvrage de M. Ferrier, en fait d’Outre-mer, était surtout un prétexte pour narrer la vie formidable de son aïeul (et par ricochet la sienne), s’inscrivant ainsi dans une trajectoire plus familiale que géographique. Trajectoire qui par endroits confine à ce mal français que l’on désigne pudiquement sous le terme de delphinedeviganisme.

Bien entendu cela n’enlève rien à la fraîcheur du récit de Ferrier, qui est distrayant et donne véritablement envie d’aller passer du temps Madagascar.

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D’autres Outre-mer que le mien

Seulement voilà, quand on choisit d’intituler son ouvrage « Mémoires d’Outre-mer », peut-être faut-il aussi prendre le temps de quitter le sentier familial. Car les rares excursions de Ferrier hors de Madagascar font plouf. Je copie-colle ici le passage dédié à Clipperton :

« Et l’île Clipperton, à douze mille kilomètres de la France mais qui est la France quand même, depuis le 28 janvier 1931, par l’arbitrage de la Cour internationale et du roi Victor-Emmanuel III d’Italie. Le saviez-vous ? Nous avons des compatriotes en plein coeur de l’océan Pacifique, dans l’atoll le plus isolé du monde (selon les savants calculs de l’Union internationale pour la conservation de la nature), dans cet amas de graviers, de sables coralliens et de guano, peuplé de reptiles, de crustacés et de poissons, tous français comme vous et moi. »

« Le saviez-vous? » On aimerait partager l’extase de l’auteur devant cette découverte… mais quiconque s’intéresse un tantinet à l’histoire des territoires français dans le monde sait que nos compatriotes clippertonais ne sont aujourd’hui pas légion.

Ce qui ne veut pas dire que l’histoire de l’îlot est dénuée d’intérêt, bien au contraire. On en a même fait des romans et des films. Ce paragraphe du récit, aussi court soit-il, aurait sans doute pu s’en faire l’écho, et ainsi illustrer l’intérêt de l’auteur non pas pour « son » outre-mer mais pour tous « les » outre-mer.

Ce détail pourra paraître anecdotique à certains mais s’il est un message que porte l’Outre-mer – que nos lecteurs éloignés me pardonnent de m’exprimer en leur nom – c’est sans doute celui-ci : « nous ne sommes pas des anecdotes ».

Vue septentrionale de Clipperton. Aucune moustache à l’horizon.

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