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Arcadie, d’Emmanuelle Bayamack-Tam

30 Sep

Lu par… Alys

Roulées au chanvre

 

 

 

 

Farah grandit dans une communauté hippie dans le Sud-Ouest de la France. Entourée de sa grand-mère LGBT exhibitionniste (« Ayant toujours clamé que le soutien-gorge était la mort des seins, elle ne semble pas réaliser que les siens coulent désormais parallèlement à son thorax, mamelons en bout de course à trente centimètres de leur lieu de naissance et battant la breloque au moindre mouvement« ), d’une mère ancien mannequin névrosée (« elle ne sort plus : elle gît sur les coussins de son canapé Mah-jong, parle d’une voix chavirée et agite des mains dolentes en direction de son staff : Marqui, Kirsten et moi, respectivement époux, mère et fille de cette élégante épave« ), d’un père qui jardine des plantes psychotropes, mais aussi d’un gourou Dieu du sexe et d’une farandole d’autres personnages un peu cinglés, elle atteint tant bien que mal l’adolescence.

Elle observe son monde avec une certaine sagesse et pas mal d’humour : « La vie est mal faite, et les couples mal assortis : ma mère, qui s’accommoderait très bien d’un partenaire comme Victor, aux érections rares et mollissantes, se retrouve avec mon père, qui la presse et la harcèle pour qu’elle consente à lui ouvrir les cuisses« .

Envahie par l’ennui si propice à l’adolescence, et à l’occasion de ses seize ans, elle décide, grâce à l’intervention du gourou Arcady, de découvrir son corps et la sexualité. Le premier s’avère un peu déconcertant, coincé à mi-chemin entre la femme et l’homme, la seconde débridée, intensive et instructive : « Dans sa grande perspicacité, Arcady a saisi le moment très exact où mon royaume risquait de ne plus me suffire pour y déchaîner l’orage tant attendu, la passion orgiaque, le grand chambardement. Je suis insatiable, mais il ne l’est pas moins, et c’est bon, de sentir son amour, son désir, sa juste appréciation de ce que je suis, en dépit de mon intersexuation, de ma gueule à la Stallone, et de mes rêves à la Farrah Fawcett. »

Farah continue son apprentissage jusqu’à l’irruption d’un clandestin dans la communauté, qui, ayant décidé de se baigner à poil tous les soirs dans le lac du domaine, va bouleverser sa vie l’emmener, hors de la communauté, vers l’âge adulte.

Un roman à l’écriture efficace, précise, rythmée et très drôle. Un coup de cœur de la rentrée littéraire.

Que fait la Miviludes ?

Ligne & Fils, d’Emmanuelle Pagano

21 Oct

Lu par Anne

Bacchantes humides

Bacchantes humides

 

 

 

 

Tout ce qu’Emmanuelle Pagano écrit, c’est comme si elle me le murmurait à l’oreille.

On attend la suite

On attend la suite

 

 

Une vie pornographique, de Mathieu Lindon

25 Oct

Editions P.O.L

Lu par Alexandre

Poudre rasoir

Poudre rasoir

Comment justifier le choix de ce titre ?

Serait-ce dans l’espoir un peu fou de taper dans l’œil d’un de nos jurés, et pourquoi pas,  boum, se voir décerner un trop Virilo sur un malentendu ? Loupé.

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Remboursez! Remboursez!

Le mash-up Trainspotting/ Santa Barbara

Perrin est universitaire, héroïnomane et cocaïnomane. Prof de lettres d’ailleurs, mais on s’en fout.

Perrin aime Benassir, Lucien aussi, et puis tiens, Kei le japonais. Le problème de Perrin, c’est que l’héroïne le rend impuissant. La situation est d’ailleurs assez brillamment résumée par cette maxime acrobatique : «Entre poudre et cul, tu as la bite entre deux chaises». 

Perrin, ça l’énerve un peu tout ça, alors du coup, il s’inscrit dans une salle de sport pour arrêter la drogue.

Ce titre, c’est de la poudre aux yeux

En sus de leurs titres interdits aux mineurs, l’oubliable Pornographia  de Jean Baptise del Amo, et Une vie pornographique ont pour points communs d’être nuls et de causer (un peu) d’amours gays.

Qu’on ne se méprenne pas : si la vie du protagoniste est «pornographique» ce n’est pas tellement à cause de sa pratique bestiale du love mais plutôt en raison de l’usage obscène qu’il fait de la drogue. Lecteurs-voyeurs, passez votre chemin, ce titre ce n’est donc que poudre aux yeux.

L’héroïne : une protagoniste  comme les autres ?

Mettre la drogue au centre du roman n’est pas en soi  une mauvaise idée, surtout quand elle s’appelle « héroïne ». Mathieu Lindon arrive même assez bien à nous faire sentir le mal de vivre méconnu du toxicomane bourgeois. Bonus : On sortira légèrement plus instruit de cette lecture, youpi, apprenant par exemple qu’on peut aussi bien sniffer que s’injecter l’héroïne.

Au delà de ça, il n’y a rien malheureusement rien à sauver. Le roman consiste en une  répétition sur 250 pages du scénario manque-dealer-drogue-drague-manque, sans que cela soit véritablement bien écrit, ni même drôle… Les rares blagues qui viennent égayer la monotonie du récit semblent directement piochées dans l’almanach Vermot des toxicos :

« – Tu as maigri dit Perrin

– Pourtant, j’ai pris quelques grammes, dit Lusiau en reniflant significativement»

Un conseil : si vous aussi, vous aimez vous faire de belles lignes, évitez celles de Mathieu Lindon.

Juré cherchant au flair les bons passages du livre

Juré cherchant au flair les bons passages du livre

Ormuz, de Jean Rolin

19 Sep
Jean Rolin

La barbuz du routard intello

         Editions POL

         Lu par Claire

Wax (oui, c’est son nom) a décidé, malgré une décrépitude entamée et un solide penchant pour l’alcool et la mythomanie, de traverser à la nage le Détroit d’Ormuz. Un détroit mal fréquenté par des navires de guerre, des pétroliers, et les boulettes qu’ils perdent en cours de route.

Jean Rolin

Qui vient se baigner avec moi?

Fidèle Sancho, Jean Rolin, narrateur omniprésent, sillonne la région afin d’effectuer un repérage politico-géographico-culturel pour le compte de son ami, son collaborateur, son patron Wax, qui n’apparaît lui-même qu’à travers la plume de l’auteur. Un voyage entre réalité et fiction dont on ne comprend ni la nature ni l’aboutissement, si ce n’est que son auteur prend un plaisir évident à le décrire, à défaut de savoir s’il le réalise vraiment.

Jean Rolin

Tout est là.

Certes, ce roman livre est superbement documenté et raconté, et constitue même un cours de géopolitique largement plus intéressant que la moyenne, mais comme je le confiais avec classe il y a peu à l’un de mes confrères à la pilosité douteuse:  » Ormuz a avantageusement remplacé mes habituels somnifères : tout aussi efficace, bien plus cérébral, et sans effets secondaires. » Il ne lui manque finalement que la dimension fictionnelle – romanesque – qui aurait été à même de faire frisoter ma moustache de lectrice. Dommage.

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