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Lu par F.S
Au début, on a un peu peur. Peur que se la joue Mazarine Pingeot et ses bébés congelés en exploitant un fait-divers – une vague de suicides dans une grande entreprise – pour en pondre un roman dans l’ère du temps. On l’a échappé belle, mais non.
Claudel change de genre. D’un roman social de prime abord, il bascule petit-à-petit dans l’absurde pour arriver au non-sens absolu. Et c’est un régal. A travers des procédés parfois un peu éculés il est vrai (les personnages n’ont pas de nom mais sont appelés par leur qualification), on entre dans une critique de l’époque fine et bien sentie. Les pages se déroulent avec la crainte timide d’une nouvelle invention encore plus terrible. On entrevoit l’enfer dans l’absence de sens, dans le vide qui n’est au fond jamais très loin. On pense à Orwell de temps à autre puis on se ravise. C’est du Claudel. Et c’est déjà pas si mal.
Re-lu par Marine
Cette critique sera intellectuellement malhonnête. Vous êtes prévenus. Car j’ai des préventions fortes contre ce type de bouquin. J’ai bien essayé de m’extraire de mes préjugés en lisant l’énième-roman-de-Philippe-Claudel-qui-sera-adapté-sur-les-écrans-avec-(au pif)-Daniel-Auteuil. Mais je n’y suis bien sûr pas complètement arrivée. Peut-être parce qu’il est tel que je me l’imaginais avant de l’ouvrir. Peut-être parce que je foncièrement mauvaise. Rendons néanmoins à César blablabla, l’atmosphère rendue, pénible, doit certainement être conforme aux visées de l’auteur. Sur ce point, c’est assez réussi. Essayons-nous à une deuxième tentative d’honnêteté : contrairement à ce que laissait présager le sujet (une vague de suicides dans une grande entreprise…), l’approche est intéressante avec cette volonté d’universaliser le propos grâce à l’utilisation frénétique de la majuscule (l’Enquêteur certes mais aussi le Policier, le Garde etc.) et cette vision apocalyptique d’une entreprise devenue la matrice d’une société (presque) sous contrôle. Pour le reste, passablement convenu, je suis assez réservée.
Les poilus parlent aux poilus